mercredi 10 juillet 2013

Ferry (Jules) le retour !

La proposition n°2 s’intitule «  adapter les programmes scolaires de manière à mettre en lumière à travers l’histoire les personnalités et les éléments fondateurs du récit économique de la France »

En tant que Républicain (au sens français, pas américain du terme), je ne pourrais qu’adhérer à cette proposition. L’école républicaine a été fondée pour instruire les jeunes français aux fins d’en faire de bons citoyens capables de s’émanciper de l’emprise des cléricalismes, de celui de l’Eglise catholique au départ, mais aussi de tous les cléricalismes tentant d’imposer leurs dogmes, celui de l’Argent étant le dernier en date.

Les réformes scolaires entreprises depuis les années 1970 n’ont eu de cesse de faire des enfants de bons consommateurs et pour cela de les empêcher de réfléchir, car sinon, comment pourrait-on se précipiter sur le dernier I-phone ou sur le prochain CD de la Télé Académie !
La dernière réforme en date, décidée par Xavier Darcos en 2008, en constitue un bel exemple. J’ai extrait les réactions suivantes d’une interview de Dimitri Casali, historien et auteur d’une trentaine d’ouvrages dont «L'alter manuel d'histoire de France -Ce que nos enfants n'apprennent plus au collège» (Ed. Perrin),
« Beaucoup de grands personnages ont été mis à l’écart.(…) Parce qu’en France, il est de bon ton de raboter ce qui est trop grand, d’être politiquement correct. Louis XIV était trop puissant, Versailles était trop riche. (…) Les jeunes n’ont plus de racines. On a désincarné leur histoire (…) Napoléon n’a jamais fait la guerre, la guerre ça tue, c’est mal. »

Nous voici donc revenus 150 ans en arrière avec cette proposition qui nous ramène à Jules Ferry et aux bienfaits de l’école laïque obligatoire vantant les Bernard Pallissy, les Cugnot et autres inventeurs ou capitaines d’industrie dont les programmes d’époque faisaient l’apologie. Car contrairement à ce que pensent les auteurs du rapport, il n’y avait pas dans ce grand récit républicain que des philosophes et des soldats, la France coloniale de l’époque avait aussi besoin d’un récit économique.

Nous voici donc revenus d’autant plus à la Troisième République que la proposition n°3 s’intitule « tenir annuellement un 14 juillet économique sous forme d’une conférence nationale de la Marque France en présence du chef de l’Etat »
Il faut se rappeler que la fête nationale française a été instituée le 14 Juillet par la loi en 1880, en référence à une double date, celle du 14 juillet 1789, date de la prise de la Bastille, jour symbolique entraînant la fin de l'absolutisme, de la société d'ordres et des privilèges, et celle du 14 juillet 1790, jour d'union nationale lors de la Fête de la Fédération. Il s’agissait à l’époque de célébrer le génie français qui apportait sa lumière sur le monde entier du Tonkin au Congo.

Ce retour en arrière est bien dans l’esprit du temps et correspond tout à fait à la volonté du ministre de l’Education Nationale de revoir les programmes scolaires pour y mettre par exemple l’enseignement de la morale.
Mais est-ce bien réaliste de vouloir exalter le sentiment national ? Est-ce bien réaliste au moment où l’Europe peine à se construire et va avoir besoin de toutes ses forces vives de reconstruire un récit centré sur la France ?

Que le marketing territorial s’empare du dossier de la différenciation c’est, si j’ose dire, de bonne guerre. Mais de là à ce que les programmes d’enseignement de la République entrent dans ce jeu voilà qui est un autre enjeu, une autre dimension. 

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